A l'origine, la pointe du Kador suffisait à protéger le port.
Réfection du môle des sardiniers en 2019 sur la partie élargie en 1951. A droite une "allée" de pavés d'origine sur le môle initial.
Môle des sardiniers à marée haute.
Môle des sardiniers à marée basse.
Môle des thoniers.
Vestiges de la première digue – procédé Berger-Staempfli.
Digue Delta – brevet Berger-Staempfli
°°°
La digue est formée de deux parois en béton armé. La paroi côté mer porte des redans pour amoindrir la houle. La houle dissipe son énergie en pénétrant dans le tunnel par des ouvertures prévues à cet effet puis la mer ressort côté port avec moins de violence.
Projet publié en 1970 dans le bulletin communal.
Le port de plaisance est accessible en 1972. 1973 projet de pontons flottants.
Nez de la digue à marée basse.
Hiver 2022. Une mer forte déplace un bloc de l'enrochement.
Hivernage.
°°°
Les pêcheurs Morgatois et les commerçants voient régulièrement
une mer menaçante arriver sur le chemin qui longe la mer et qui remonte
jusqu'au Loc'h, un vaste étang qui coupe Morgat en deux.
Les problèmes de submersion et d'érosion sont déjà connus au 18ème siècle
comme l'atteste une carte de 1757 sur laquelle on distingue une jetée
protectrice de pierres, une partie du village à l'Ouest, une zone marécageuse
importante séparée de la mer par un cordon de galets au centre et l'autre
partie du village à l'Est. Ce projet de jetée n'est pas réalisé de manière
officielle, simplement, les Morgatois grandissent un passage élevé en
pierres sèches pour passer d'un bord à l'autre de l'estuaire de la zone
humide en charrette. Certaines marées furieuses entament la construction,
avec patience, les pêcheurs remontent les pierres. Cette construction
aléatoire semble satisfaire ses utilisateurs qui privilégient la construction
d'un môle en dur dès 1846 jusqu'en 1861 qui permet les embarquements et
débarquements à toutes les marées.
Les quais étroits sont en pierres sèches empilées depuis des lustres mais
ne laissent pas passer les voitures attelées qui transportent les marchandises
débarquées. Le maire Louboutin octroie une subvention de 7000 Fr pour
de nouveaux quais bordant un nouveau terre-plein. L'entrepreneur Moulin,
vers 1885-1887, construit des quais maçonnés en granite de la montagne
de Locronan pour la somme de 56197,50 francs. Ces quais ont connu l'âge
d'or du port de Morgat, ses conserveries, ses magasins. Une vie économique
fragile liée à une pêche incertaine. Il n'y aura jamais eu de grands échanges
de marchandises au port, après la pêche l'ère du tourisme fera naviguer
des bateaux à vapeur vers Douarnenez.
Le premier môle des sardiniers est allongé en 1902 (élargi en 1951 + un
escalier - mise en feu de 1956-2006). La crise sardinière de 1902 et 1903
annonce le déclin de la pêche à la sardine. Progressivement, le môle sert
davantage, à la saison, aux touristes ou aux premiers thoniers.
Les quais sont partiellement détruits ainsi que plusieurs maisons lors
du bombardement américain de la libération.
Plus tard, la nouvelle pêche au thon, après la seconde guerre mondiale
jusqu'en 1990 environ, avec des bateaux plus grands (22 thoniers en 1965)
nécessite un débarquement plus performant avec une possibilité d'approche
de véhicules motorisés. Le môle des thoniers en béton double celui des
sardiniers saturé.
Cette fois la pêche décline pour de bon, rien ne remplace le thon, la
plaisance intègre le port de Morgat. Les voiliers ont souvent des quilles
importantes qui rend l'échouage d'antan périlleux. Partout en France,
on construit des marinas, chaque ville côtière a son port de plaisance.
L'effet mode vient jusqu'au port de Morgat.
En 1969, il est décidé de créer un brise lame constitué de caissons creux
en béton armé perpendiculairement à la côte mais à une distance de 70m
de cette dernière pour que la mer puisse tourbillonner et amener le sable
du port au large. La possibilité d'un ensablement du port avait été envisagée.
Les caissons sont fabriqués sur place et posés au fond de l'eau progressivement.
En 1970, les travaux s'interrompent durant la période estivale. Le 9 septembre
une tempête nuit au chantier. La mer entre dans le "tunnel" inachevé et
y décuple ses forces. Le brise lame est un fatras. Les trois entreprises
jettent l'éponge et l'une fait faillite. Sur les quais avoisinants, des
blocs de béton en attente sont abandonnés longtemps avant d'être enlevés.
Bien que l'expérience fut un échec, elle avait le souci des particularismes
du port. La seconde digue par enrochement n'en fera pas cas... Cette nouvelle
digue par dépôt de rocher au fond de la mer par empilements est décidé
en 1972 sans aucune étude préalable, la loi de l'époque ne l'impose pas
avant 1976. Une société marseillaise habituée à ce genre d'intervention
en Méditerranée lance le chantier pour 8,1 millions de francs financé
par l'Etat à 40% dont 1 million par l'armée en dédommagement de l'occupation
des terrains de l'île Longue (conditions pour l'installation de la base
sous-marine imposée par le général de Gaulle), puis 25% par le département
et enfin 35% par la commune.
Le coût est élevé et le premier ponton ne pourra rentabiliser le port,
il faut en ajouter d'autres et créer ou agrandir les infrastructures,
construire la capitainerie ce qui ajoute 13.9 millions à la facture. Les
gros travaux s'achèvent en 1979. Plusieurs plaisanciers acquièrent une
maison de vacances à l'époque. De nouveau quartiers se développent à hauteur
de 140 maisons.
Malheureusement, la nouvelle digue enferme le déplacement du sable de
l'anse de Morgat sans possibilité d’échappatoire. Des campagnes de désensablement
sont effectuées chaque année par dragage marin ou désensablement par voie
terrestre mais les volumes déplacés naturellement sont bien plus élevés
que les volumes prélevés par l'intervention humaine. Les municipalités
successives entrevoient une facture dispendieuse si l'on devait supprimer
la digue sachant qu'aucune solution de remplacement n'est trouvée malgré
plusieurs études techniques et propositions "inventives"... Un port à
sec pour les hivernages existe mais le nombre de places est limité.
Les quais et ses abords avec la construction d'une estacade renouvellent
l'aspect du port en 2014. En 2018, on parle d'un projet de reconstruction
de la capitainerie à hauteur de 425 000€ hors taxe (50% à 80% de subventions
selon les sources). La motivation du chantier est conduite par la nécessité
de respecter les normes d'accessibilité aux personnes à mobilité réduite
ainsi qu'aux normes d'économie d'énergie. L'opposition du conseil municipal
en décembre 2018 se fit entendre rappelant les multiples problèmes du
port de plaisance dont l'ensablement et l'affaissement estimé de la digue...
Une rénovation du bâtiment existant était jugée suffisante.
Suite à l'ensablement du port de Morgat, une multitude d'études propose des solutions qui font souvent appel à du béton. En 2009, la mairie publie un plan laissé sans suite... Quelques années plus tard, le projet d'une digue au Portzic est envisagé. L'expertise payante fini en dossier poussiéreux. Un de plus...
Marée basse 2023.
Désensablement mécanique.
Bar Relais des pêcheurs à Morgat
A l'aube, le Relais des pêcheurs voit la vie en rose. Un
bar en préfabriqué devenu mythique à force de résister à tous les courants
d'air sur les quais de Morgat. Chaque gérant - Tante Hélène (Hélène Roudot
jusqu'en 1986), Pierre Le Port jusqu'en 2012, Michel Kerneïs depuis, ont
fait vivre cette concession municipale de 105,5m² avec le sentiment d'être
loin du monde et proche des pêcheurs. A certaines grandes marées, il y
a un peu de goémon à la porte comme un signe de bienvenue maritime.
En 1971, Hélène Roudot quitte la gérance du restaurant "La Flambée", à
proximité, à une période douloureuse de veuvage. La mairie propose la
construction d'un petit estaminet (sans les terrasses - juste le bloc
de base) pour le mettre en gérance. Cette aide inespérée donne du cœur
à l'ouvrage à "Tante Hélène", voilà le début de la belle histoire du "Relais
des pêcheurs". Hommage à la solidarité bretonne, à l'esprit d'entraide
entre pêcheurs.
Désormais, c'est le "Pays" Michel Kerneïs qui poursuit l'aventure
en bord de mer !
Capitainerie du port de Morgat en Crozon
La capitainerie du port de Morgat en Crozon est un bâtiment
des années 1970 qui propose les services sanitaires de base - toilettes
- douches ainsi qu'une laverie pour les plaisanciers du port.
En 2018, la municipalité inscrit les travaux d'une nouvelle capitainerie
en containers modulables dans le programme DETR 2019 à hauteur de 425 000€
HT avec une possibilité de subventions estimées à 80%. La décision du
conseil municipal du 6 décembre 2018 décrète de ne pas mettre en conformité
d'accessibilité et d'adaptation aux économies d'énergie imposées par les
réglementations en vigueur, les bâtiments existants. Une nouvelle construction
est donc envisagée.
En 2019, retournement de situation, le projet de rénovation de la capitainerie
du port de Morgat passerait par le remplacement des escaliers, l'installation
d’un ascenseur, le réaménagement du patio. Le coût prévisionnel est de
570 000€ HT, avec une possibilité de subventions jusqu’à 80 %. L'achèvement
des travaux est prévu pour l’été 2021.
Nouvelle municipalité en 2020, le projet est en attente.
En 2022, lors d'un conseil municipal, les travaux de la capitainerie sont
estimés à 1 330 985€ HT dont 20% reviennent à la commune soit 266 120€...
Un premier projet modulaire de 2018.
Un second projet.
Travaux 2022.
La maison du marin en Morgat
Le magasin rose remplace l'abri du marin.
°°°
La « Maison du marin » du quai du Kador à Morgat détenait les mêmes intentions que l'Abri du marin de Camaret et de bien d'autres port de pêche. Le syndicat des pêcheurs Morgatois, mené par Antoine Bott, récupère sous la bienveillance de la mairie de Crozon, l'ancienne concession du conserveur Plaçon pour y construire en 1904 une maison d'accueil ainsi qu'un magasin d'avitaillement pour les pêcheurs. Une maison d'accueil rose à vocation sociale et d'entraide pour aider les marins à se sortir de l'alcoolisme, leur apporter de la détente (jeux de cartes par exemple) et éventuellement une formation. Le magasin quant à lui fournit le matériel de toutes les nécessités pour un embarquement. Le bombardement de septembre 1944 détruit la maison et celle du voisinage, le chantier naval Belbeoch ainsi que l'hôtel de la Montagne en retrait sur la falaise. Le bâtiment actuel de remplacement date de 1960.
Le chantier naval Belbeoch ouvre sur les quais de
Morgat en 1896 à une époque où la pêche à la sardine est reine.
Joseph Belbeoch se spécialise dans les chaloupes, les plates et les sloops
de tailles raisonnables qu'il produit avec ses ouvriers charpentiers en
abondance (plus de 20 par an dans les meilleures années). Il réalise aussi
quelques dundees et côtres, tout autant des bateaux de plaisance. Les
pêcheurs Morgatois sont satisfaits et sont les acheteurs presque exclusifs
du chantier. Le marché camarétois est fermé par les chantiers locaux.
La qualité des sloops construit une réputation qui va sortir du port pour
aller se faire connaître l'autre côté de la baie, à Douarnenez, Audierne,
à l'île de Sein, etc. Quelques régates dominicales sont organisées à la
belle saison et les sloops Belbeoch se font remarquer... Pour l'époque,
c'est considérable que d'être connu et reconnu en dehors de son pré carré.
Cette notoriété va culminer jusque la veille de la première guerre mondiale.
Ensuite plus rien ne sera comme avant pour plusieurs raisons qui s'accumulent
au dépend des charpentiers de marine.
L'économie défaillante de l'après guerre, l'absence d'hommes (tant de
morts au front), l'effondrement de la pêche à la sardine dont les cours
sont si bas qu'aucun pêcheur ne parvient à faire le moindre bénéfice,
parfois c'est la pénurie de sardines durant la crise sardinière, l'augmentation
du nombre des chantiers navals. Certains bons ouvriers tentent leur chance
et entreprennent eux-aussi un chantier naval, ce fut le cas de Pierre
Sévellec formé chez Belbéoch puis tenté par l'indépendance. Enfin certains
pêcheurs démunis construisent leur propre chaloupe. Tout cela enraille
la croissance du chantier qui va subsister jusqu'en 1944. Les réparations
et un nombre décroissant de mise en chantier (3 à 5 par an avant la seconde
guerre mondiale) assombrissent les perspectives.
A Camaret, des chantiers ferment, d'autres prennent un essor qui paraît
sans limite avec des mauritaniens de 25 mètres et plus. Les langoustiers
d'un tel tonnage ne sont pas la spécialité du chantier de Morgat qui excelle
dans des petits tonnages qui n'ont plus cours. Le bombardement américain
précurseur de la libération de la presqu'île de Crozon va écraser le bâtiment
du chantier qui ne sera jamais relevé. La famille garde un lien avec la
construction de marine. Un autre chantier Belbéoch est ouvert au Fret...
Plusieurs membres de la famille trouvent places sur des chantiers parfois
hors presqu'île.
L'orthographe du patronyme Belbeoch varie selon les sources sous des écritures
telles que Belbéoch ou Belbeoc'h... A la française ou à la bretonne...
Le môle des thoniers
Le môle des thoniers disparaît sous une marée d'un coefficient de 117. Seuls les lampadaires restent visibles. Les pontons flottants du port de Morgat sont au plus haut.
Temps calme, donc pas de vagues-submersion qui auraient déferlé sur les quais de Morgat.
°°°
Après les pénuries de sardines et les famines (1902-1903)
qu'elles occasionnèrent, quelques années avant la première guerre mondiale,
les pêcheurs de Morgat ont conscience que leur activité va en décroissance
et que rien ne les sauvera s'ils ne trouvent pas une alternative déjà
pratiquée dans d'autres ports de pêche bretons. La solution de reconversion
est la pêche au thon au large avec des campagnes d'un mois environ au
lieu des sorties de pêche du jour et ceci des côtes africaines (les Açores
en juin), jusqu'aux côtes irlandaises en septembre. Problème majeur à
ce recentrage d'activité, les barques sardinières ne sont pas adaptées
à la haute-mer ni à la pêche de ce poisson migrateur. L'investissement
dans l'achat d'un thonier alors à voile n'est pas à la portée de toutes
les bourses d'autant plus que les chantiers navals de la presqu'île n'en
ont, pour l'heure, pas l'expérience.
Les thoniers proviennent des chantiers de construction du Sud de la Bretagne
jusqu'à la construction du premier thonier morgatois de 1924 le «Yves
et Jean» aux chantiers Sévellec. Ensuite, progressivement, les thoniers
se multiplient. Le môle du 19ème siècle remanié suffit encore au débarquement
des pêches. Les thoniers à moteurs (mixtes dans un premier temps soit
à voiles et à moteur) après la seconde guerre mondiale, nécessitent un
môle spécifique plus large sur lequel des véhicules motorisés peuvent
emporter la pêche dans les plus brefs délais.
Une vendéenne, mareyeur-e, attendait les pêcheurs à la balance de pesée
en "bout de môle" pour un achat au poids immédiat. Les pêcheurs
vendaient vite au cours du jour. L'opération rapide évitait la contrainte
de la conservation.
Pour soutenir la pêche au thon la CCI de Brest – Chambre de commerce
et d'industrie de Brest – finance le môle/quai des thoniers en 1951.
Fréquentation maximale du port de pêche de Morgat par 22 thoniers en 1965.
Ensuite la pêche au thon décline et l'absence de moyens financiers pour
acquérir des bateaux usines en acier font que la pêche aux thons s'éteint
dans les années 1980 et pour quelques ultimes unités, l'activité de pêche
va se poursuivre jusqu'en 2000 après avoir modifié l'équipement de pêche
pour transformer le thonier en chalutier caseyeur (pêche avec des casiers)
par exemple. L'ultime chalutier/thonier de la flottille morgatoise est
le «Beg ar Gador» du nom de la pointe éponyme située derrière le port
qui de par une voie d'eau au large de l'Irlande se trouve inutilisable
et détruit en 2004.
Régates de Morgat
Yachting à Morgat, les régates du mois d'août. Durant des
décennies, les étés en presqu'île de Crozon étaient animés par des régates
dont la plus chic était la coupe d'Ys entre Douarnenez et Morgat qui se
disputait à la fin août de chaque année. Deux comités de Yachting celui
de Douarnenez et de Morgat, mêlant notables et patrons pêcheurs, organisaient
la course en ayant pris soin de classer les voiliers participant par catégorie
basée sur la jauge... L'esprit d'égalité s'arrêtait là car sur les vagues
on voyait des voiles épaisses jaunes à oranges (caoutage) pour les pêcheurs
et légères et blanches pour la bourgeoisie. Chaque participant, exclusivement
amateur, recevait une médaille de bronze et les vainqueurs par catégorie,
un prix en numéraire. Pour les pêcheurs, la remise des prix se faisait
à l'abri du marin sur les quais de Morgat vers 18h et pour les notables
un salon de l'Hôtel Sainte Marine était ouvert à 20 heures en présence
du comité des régates de Brest et celui du yacht-club de la plage de Morgat
dirigé par Antoine Bott dans les années 1920.
Malgré les distinguos de classe sociale, la fête battait son plein sur
les plages. Jeux de sacs, danses, musiques bretonnes, concours de natation,
jeux bretons, etc. Dès que les voiliers approchaient de la ligne d'arrivée
tenue par la pointe du Kador et une canonnière de la marine dépêchée par
le préfet maritime, les touristes venus de Brest par bateaux à vapeur
via le Fret, les pensionnaires des hôtels, les habitants, tournaient leurs
yeux vers les victorieux. Le comité des régates de Morgat fut fondé en
1896 sous la houlette de la famille Peugeot.
1921 : le comité des régates de Morgat, assisté de plusieurs patrons pêcheurs,
se réunit à la maison du marin en juillet, sous la présidence de Mr Antoine
Bott. Ouverture de la séance par la lecture des comptes moral et financier
tenus par Mr Keraudren, trésorier. Election de Mr Ancel secrétaire du
comité et messieurs Le Couteur, Breitling, Peugeot, Guillemot, Nicolas,
Raillard, Salaün, membres du comité. Messieurs Jan (garde-maritime), Laurent
et Jean Drévillon, Le Moal, Laurent Moulin père et Pierre Quintric, marins
pêcheurs, sont ensuite désignés membres du jury.
Quelques détails des régates de 1924. Canonnière « Etourdi » commandée
par le lieutenant de vaisseau Perzo avec à bord les membres du jury. Les
comités organisateurs remerciaient les yachtmen et pêcheurs (dénominations
officielles) de leurs participations ainsi que les généreux donateurs
qui en 1924 se nommaient : Messieurs Yves et Pierre Bourvon, Derrien,
Goalès, Moulin, David, Pierre Lavallée de la villa Kermor, Le Duplan,
Chanez, Luciende Vissez, Ozérée, Hubert Christiensen, le docteur Le Couteur,
Gresselin, Hubert, Pitel, M et Mme Leclézio, Raillard, Lullien (Eugène,
Léon, Jules), Commenge père, Breitling-Peugeot, Belhomet en villégiature
à l'hôtel de la Mer, Le Paul père et fils, Mme Firmin, Auguste Keraudren.
1926, résultats des courses et prix :
Première série : Chaloupes de 22 pieds et au-dessus.1er prix, 80 fr et
un compas, « Pointe du Raz » à Mr Joseph Nicolas. 2ème prix 80 fr et une
plaquette de bronze, « Petite Monique » à Mr Boussard.
Deuxième série : Langoustiers de treize tonnes et au-dessus. 1er prix,
100 fr offerts par Mr .T. Renauld, des Galeries Saint-Martin, et un baromètre,
« Yvonne et Marie » Mr Alexandre Kerdreux. 2ème prix 60 fr offerts par
M. Barré, mareyeur à Lorient, et une plaquette de bronze, « Fleur de Mai
» à Mr Alain Vigouroux.
Troisième série : Langoustiers au-dessous de treize tonnes. 1er prix,
60 fr offerts par M. Poriel, et un baromètre, « Fleur du Pays » à Mr Jean
Kerdreux. 2ème prix 60 fr dont 40 fr offerts par Mr Poriel, « Saint-Nicolas
», à Mr Alain Breton.
Quatrième série : Cotres, sloops et sardiniers de quatorze tonnes et au-dessus.
1er prix, 80 fr dont 50 fr. offerts par Mr Breitling et un baromètre,
« Breiz lzel » à Mr Laurent Drevillon. 2ème prix 70 fr dont 50 fr offerts
par la Dépêche de Brest, et une médaille de bronze, « Honorine » à Mr
Yvon Riou. Cinquième série : Cotres, sloops et sardiniers de moins de
quatorze tonnes. 1er prix, 80 fr dont 50 fr offerts par les Vapeurs brestois,
et un compas, « Mendonn » à Mr Moysan. 2ème prix 80 fr et un fanal tempête,
« Petit -Joseph » à Mr Joseph Breton. Sixième série : Canots de quatre
tonnes et au-dessous de sept tonnes. 1er prix 50 fr et un fanal tempête,
« Marguerite » à Mr Jean Belbéoch. 2ème prix, 40 fr, « Esclave du Devoir
», à Mr François Guéguiniat.
Septième série : pas de concurrents.
Huitième série : Plaisanciers. 1er prix. 25 fr et un objet d'art, « Kétao
» à Mr Choisnard. de Douarnenez. 2ème prix 20 fr et une médaille de bronze,
« Oiseau Bleu » à Mr Lendormi. 3ème prix 10 fr, « Bengali » à Mr Le Couteur.
Neuvième série : Thoniers. 1er prix. 80 fr et un compas, « En Avant »
à Mr Jean Ménesguen. 2ème prix 80 fr, « Rouge » à Mr Yves Sénéchal.
Réunion du comité des régates de Morgat à la villa Kerlisanton d'Antoine
Bott, président du comité, puis vers 13h30 descente en musique sous le
drapeau vers le port. Le jury s'installe ensuite à bord de la canonnière
« Sans Souci » commandée par le lieutenant de vaisseau Lahalle. Première
course pour la première série, départ au canon à 14 heures. Des commissaires
des jeux avaient réglé les festivités terrestres pour les divertissements
des publics confondus.
Liaison maritime entre Douarnenez et Morgat
En 1886, le voilier de la famille Peugeot "Ville d'Is"
est utilisé pour assurer une liaison maritime touristique entre Douarnenez
et Morgat ainsi que quelques excursions pour visiter les grottes marines
locales. L'expérience étant un succès, un service de bateaux à vapeur
est instauré pour l'été 1887. Les liaisons maritimes entre Le Fret et
Brest ayant une utilité publique, celles-ci sont ouvertes depuis "toujours".
Il est a noté que la famille Peugeot s'intéresse au transport maritime.
Il existe une compagnie Peugeot à Brest pour la liaison du port avec celui
du Fret en concurrence avec la compagnie Le Roux ainsi que celle de la
Société des Vapeurs Brestois. Le bateau utilisé en 1895 est le "Travailleur"
remplace le "Louise" et sert occasionnellement de remorqueur
et de bateau pompe grace à une pompe puissante de 450 tonneaux par heure.
En 1905, Armand Peugeot se fait livrer un canot de sa conception par train
à l'arrivée de Douarnenez. Le canot le "Comtois" de 5 à 6 mètres,
motorisé, traverse la baie jusqu'à Morgat en 1h30, un temps identique
à celui du grand vapeur "Rapide" qui assure désormais une liaison régulière.
En 1911, le "Comtois" sert encore de traversier. Armand Peugeot
ramène une baleine
à Morgat, fier comme Artaban. Il s'agit d'un cadavre en putréfaction qui
incommode et inquiète les Morgatois. L'industriel est contraint de renvoyer
la baleine au Cap de la Chèvre. Après une récupération toute aussi risquée
par des pêcheurs Douarnenistes, il faut que le navire garde-côte le "Pilotin"
la remorque au large de Sein pour éviter les problèmes
sanitaires.
Le "Rapide" est un des bateaux à vapeur de la Société des Vapeurs
Brestois. Les touristes sont portés à bras de chaise par deux pêcheurs
Morgatois jusqu'à une barque et ceci à partir de la plage puis rejoignent
le "Rapide" au mouillage avant de naviguer dans un bruit épouvantable
et des fumées pénibles. Le vapeur est construit en 1892 à Chantenay (Loire
Atlantique). Inscrit à Brest le 10 septembre 1892. Coque n° BR 522. 1er
armateur : Le Baut et Cie à Port Launay. 2ème armateur : Louis de la Porte
de Chateauneuf du Faou le 27 juin 1894. 3ème armateur : Société des Vapeurs
Brestois le 7 mai 1895. Patrons successifs : Yvinec (1892), Mocaër (1893),
Riou (1896), Le Mignon (1902), Riou (1903), Gourvest (1915), Bathany (1919).
Reste en service jusqu'en 1931, déconstruit en 1933. 25.10 m de longueur,
5.01 m de largeur, tirant d'eau 2.25 m avec un moteur de 150 cv, pouvant
accueillir 150 à 250 passagers selon cargaison de marchandises pour 76.19
tonneaux de jauge brute.
Avant la traversée maritime, il fallait avoir la patience des transports en voiture attelée tel que le cabriolet. Les auteurs Gustave Flaubert et Maxime Du Camp, le 21 juin 1847, font ce chemin cabossé pour atteindre Crozon avant de découvrir les grottes de Morgat en barque de pêcheur et de s'en émerveiller.
Maison phare du Kador en Morgat
La maison phare du Kador fut édifiée début 1914 par un entrepreneur
du nom d'Alexandre le Roux. La lanterne fonctionnait au pétrole à l'origine
dès le 9 avril 1914 – date de mise en service. L'électricité prendra
le relais en 1957. Une présence humaine permanente était requise pour
faire face aux changements climatiques soudains, aux levées des brumes
et brouillards quand le feu fonctionnait au pétrole et qu'aucune détection
technique n'existait encore.
Le phare est équipé d'un feu à secteurs. Secteur rouge : Morgat au Cap
de la Chèvre. Secteur vert : dangers des Verrès, de Pierre profonde et
du Taureau.
Une maison de charme pour le logement des gardiens avec des pierres d'angle
en granite et des moulures sur les corniches. Les soubassements ouvragés
en leucognanite de Pouldavid prouvent la volonté de stylisation. L'accès
à la lanterne se fait par un escalier en vis. Le blanc des murs et ce
rouge de la lanterne sont visibles loin de la côte en plein jour et peuvent
servir d'amer.
Le phare du Kador est posé non loin de la naissance de la pointe du Kador
et se trouve proche des anciennes fortifications de Morgat et de ses batteries
côtières haute et basse. L'armée (Marine) autorise la construction à la
condition qu'elle puisse détruire l'édifice en cas de guerre car celui-ci
pourrait servir d'amer pour tirer sur la batterie du Kador par des navires
ennemis du large. 28 juillet 1914, début de la première guerre mondiale.
La menace de destruction ne fut jamais mise en œuvre.
62 maisons phares construites en France. Celle du Kador fut parmi les dernières.
La légende de la Pointe du Kador en Morgat
Le rocher de la Chaise au port de Morgat, certains y voyaient une femme coiffée assise indéfiniment.
Des appellations, il y en eut : trouée de Kador ou Gador,
arche de Kador... Beg ar Kador - La Pointe du Kador ou Gador signifiant
pointe de la chaise en breton, est une avancée rocheuse à la fois dangereuse
et protectrice du port de Morgat. Les courants marins s'y déviaient et
protégeaient les mouillages des sardiniers. Mais malheur à qui s'en approchait
de trop près au risque d'y périr et de nourrir la légende de la grotte
Sainte Marine.
L'arche aujourd'hui effondrée était une volonté divine selon la légende.
Sainte Marine y perça cette trouée afin que les marins en détresse puissent
rejoindre la petite plage de sable côté port. Les malheureux qui n'y parvenaient
pas par manque de forces, sans doute étaient-ils pénitents, se réfugiaient
dans les grottes côté mer avant de recommander leur âme à Dieu si la mer
était déchainée et haute.
D'autres personnes, sans doute des suspicieuses, plus terre-à-terre assurément,
y voient l’œuvre d'une érosion naturelle et argumentent qu'une tranche
de l'arche s'était décrochée en 1977 sans qu'aucune sainte n'apparut alors
et pas davantage lors d'une nuit d'avril 1983, où toute l'arche restante
tomba en miettes sur la grève.
Le film « Le Mystère des roches de Kador » de la Gaumont (1912) fut en
partie tourné sous l'arche du Kador. Film muet de 45 minutes. Une jeune
fille héritait, par testament, du marquis de Kéranic... Cet héritage était
convoité... Avec la grande vedette Suzanne Grandais et Léonce Perret,
comédien réalisateur de renom...
Bois du Kador en Morgat
Le bois du Kador surplombe le port de plaisance de Morgat.
Une borne militaire de servitude en granit couchée marquant la servitude du terrain militaire d'antan.
°°°
Le bois du Kador d'aujourd'hui ne ressemble en rien à ce
qu'il fut dans les siècles passés. Les terres de piètre qualité agricole
étaient exclusivement des landes, quelques taillis en retrait et des garennes
sans grand intérêt à n'en plus finir. Des preuves d'élevage et de présence
humaine préhistorique semblent se trouver dans les vestiges des alignements
de Ty ar C'huré. La présence romaine est quant à elle avérée au port de
Morgat par des cuves de salaison (disparues) côté Sud du Loc'h. Ensuite
les parcelles furent nécessairement réservées à la chasse pour la noblesse
locale. Ces parcelles, à la suppression des privilèges de garenne, devinrent
des propriétés privées attachées à des fermes après la Révolution de 1789.
L'expansion des pins est tardive et est une introduction humaine par semis
à la fin du 19ème siècle et au début du 20ème siècle. Des pins de rapport
dans des terres incultivables. L'exploitation forestière ne fut jamais
développée, les pins se multiplièrent librement jusqu'aux limites des
pâtures qui « tombaient » sur les marges du village de pêcheurs.
La seule petite exception territoriale non privative était la présence
de batteries de côte dès le 17ème siècle en différentes positions selon
les stratégies de défense et l'évolution de l'artillerie. La milice se
chargeait des veilles. Un gardien de batterie surveillait l'équipement
de la place. Les grands chambardements technologiques du 19ème siècle
obus torpille imposèrent aux commissions de défense des côtes, commissions
mixtes d'officiers de l'artillerie, du génie et de la marine de développer
une multitude de projets d'installations militaires sur le haut des falaises
du bois. Le nombre de projets mena à autant de discussions interminables
de la part des experts administratifs. Au final, on constata en haut lieu
que la disposition d'artillerie mainte et mainte fois recomposée ne sut
faire face à des tirs maritimes en enfilade de navires ennemis positionnés
au large de la baie de Douarnenez. La loi du 27 mai 1889 déclassa de nombreuses
batteries de côte jugées obsolètes. Les batteries du Kador faisaient partie
de ce déclassement qui devaient les conduire vers une vente par adjudication
en faveur du privé. En 1898, pendant que les commissions de côte échafaudaient
une énième disposition, le directeur du Génie de Brest s'inquiétait de
la flambée des prix des terrains. Si l'armée devait faire des acquisitions
pour réinstaller ses nouvelles dispositions, il fallait faire vite.
En effet, à Morgat même, la spéculation immobilière, affolaient les investisseurs,
sous l'influence de la famille Peugeot qui investissait hardiment dans
l'espoir de transformer le port de pêche en station balnéaire à leurs
bénéfices. Certains de ces investisseurs rêvaient d'un casino, les Peugeot
étaient contre... Le casino ne se réalisa pas bien que des plans de Gaston
Chabal existèrent...
Une batterie de côte de 4 canons de 95mm fut construite en 1893/1896 dans
un contexte économique qui nuisait à la performance du site trop exposé
aux obus explosifs ennemis.
L'armée se délesta alors de certaines terres périphériques au corps de
garde type 1846 en 1899 mais parallèlement, acheta des petites surfaces
payées au double à un propriétaire civil qui avait conscience de l'air
du temps. Vendre une lande au prix d'une terre profonde, l'affaire ne
passa pas inaperçue. Plusieurs familles bourgeoises étrangères à la presqu'île
de Crozon, acquirent des parcelles militaires. Ce fut le cas de la famille
de Margerie qui devint propriétaire du « champ de bataille », surnom d'une
parcelle arborée. Charles de Margerie brisa le bois, selon l'expression
de l'époque, en y faisant une coupe rase, on parla d'embellissement du
fait du rang social du « bûcheron ». Dans les années 1930 (avant 1934
date de la mort de l'acheteur), la parcelle fut revendue mais à charge
de conserver le calvaire. Quant aux parcelles nouvellement militaires,
elles devaient recevoir un poste d'observation, un projecteur...
La tendance de la défense côtière en 1904 fut officiellement constituée
d'unités mobiles avec des canons qui ne l'étaient pas moins.
Juin/juillet 1909. Manœuvres de la marine pour attaquer Brest. Le poste
de commandement des troupes de défense était à Camaret sous les ordres
du vice-amiral Boué de Lapeyrère. Les troupes offensives étaient à bord
de navires de guerre dont le Gambetta. Une attaque de contournement fut
engagée à 5 heures du matin par des débarquements de troupe de St Hernot
à Morgat. La batterie du Kador tomba. Le 19ème de ligne en l'anse de Dinan,
dépêché en urgence par le préfet maritime, repoussa l'assaut. Le Gambetta
fit ses tirs de protection de ses marins refoulés, les Morgatois regardèrent
amusés les fumées et entendirent les détonations du bois du Kador...
Le bois du Kador resta partiellement militaire contre toute attente ceci
d'autant qu'un projet de 1910 envisageait une batterie lourde de mortier
de 270mm à la pointe du Menhir, en face. La batterie extérieure de Landaoudec
devait de surcroît couvrir l'anse de Morgat. Projet abandonné en 1911
ainsi que la fonction de poste de surveillance de la zone du Kador.
L'armée autorisa la construction du phare du Kador (1914) à ses abords
à la condition que cet « amer » put être détruit en cas de nécessité.
La première guerre mondiale mit un terme à toutes les évaluations incessantes.
Les canons furent déplacés sur le front de l'Est et le bois du Kador se
vit en état d'abandon, mais néanmoins, visité par les promeneurs chics
venant des hôtels et des villas de villégiature. Les ombres y étaient
bienfaisantes, les brunissements si vulgaires ne risquaient pas de matifier
les blanches peaux citadines.
La construction de la batterie du Cap de la Chèvre dans les années 1930
enterra tout avenir militaire du Kador.
Les guides touristiques vantèrent la Pointe du Kador avec son sourcil
broussailleux : le bois du Kador... dixit les publicités.
28 juin 1935, des escadres de la marine française, torpilleurs, contre-torpilleurs,
cuirassés, sous-marins... furent au mouillage dans la Baie de Douarnenez.
Les autorités maritimes, état-major de la marine, accompagnèrent la visite
du ministre de la marine Mr François Piétri séjournant à l'hôtel
de la Plage. Le public fort nombreux fut invité à se positionner dans
le bois du Kador pour contempler toute la puissance militaire de leur
marine indestructible. On devina, de loin, la sonnerie « aux champs »
quand le ministre monta à bord du contre-torpilleur Gerfaut.
2 juillet 1935, ventes de trois terrains au Menez-Cador (Montagne de la
Chaise) pour 4744m² au total. Mise à pris 25000Fr par Maître Jaouen à
Brest. Motif liquidation judiciaire. Un terrain de 1033m² est vendu en
Quenvel/Menez-Cador par licitation judiciaire. Même étude. Mise à prix
8000fr.
Le 5 et 6 août 1937, deux incendies successifs se produisirent au bois
du Kador. Le lieutenant Mammani, ses pompiers et une moto pompe à quatre
lances parvinrent, en deux fois, à circonscrire le sinistre proche du
phare en la présence de la gendarmerie et de Mr Traonouez, premier adjoint
au maire de Crozon. Une cigarette fut supposée être la cause du départ
de feu qui s'étendit rapidement.
En 1938, le 20 mars, par une matinée de déambulation, deux jeunes touristes,
mirent le feu par inadvertance, ayant fumé des cigarettes à l'insu de
leurs parents, dans des fougères proche du « Trou du diable » (grotte
marine dont le plafond est effondré). Les pompiers vite alertés par des
témoins, purent circonscrire l'incendie grâce à une réserve à eau installée
à l'été 1937 par la société Ménez-Kador. Un hectare et demi parti en fumée.
Les deux incendiaires participèrent activement à l'extinction du feu.
Lors de la seconde guerre mondiale, les Allemands y installèrent une position
de canon proche du phare. Le lieu des promenades fut interdit à nouveau.
En 1944, dans une grande précipitation, les autorités allemandes ordonnèrent
que le bois fut rasé à environ 1,5m de hauteur pour en récupérer les grumes
et les transformer en pieux anti-parachutage – asperges de Rommel
– dans des terres agricoles du littoral. Le tronc subsistant devait
servir d'obstacle anti-char. Les Morgatois réquisitionnés se précipitèrent
à scier lentement ; certains soldats Allemands n'étaient pas dupes...
Ils savaient que leur fin était proche. La tache ne fut jamais achevée.
Après guerre, l'évolution foudroyante de l'urbanisme encercla le pauvre
bois redevenu lieu de marche et de prière lors de chemin de croix de pardon.
Les fermes rustiques du Cap de la Chèvre étaient achetées par des touristes
; les agriculteurs, étonnés d'être enrichis par des ventes étonnement
fructueuses, se faisaient construire des maisons modernes avec du carrelage,
des wc..., dans les anciens pâturages de Morgat jusqu'à ce que les prix
atteignirent des sommets exclusivement accessibles à des familles fortunées
qui élevèrent des villas directement dans les abords du bois. A une période
plus récente, les maisons d'architectes se multiplièrent venant flirter
avec les lisières.
L'armée se défit de sa position en 1965, ce qui permit à la municipalité
de Crozon de prendre possession des terrains en 1968.
Le conservatoire du littoral est propriétaire du bois du Kador (en dehors
des vestiges militaires), le reste est sous la gestion de la communauté
de communes avec l'intervention de l'ONF (Office National des Forêts)
pour l'entretien du massif de résineux qu'il faut contenir et agrémenter
d'arbres feuillus d'essences variées. Les chevreuils et les écureuils
attirent les regards des amoureux de la nature et les dernières venues,
les chenilles processionnaires prennent leurs aises.
Le GR34 (Grande randonnée n°34) traverse le bois et le patrimoine militaire
au-dessus des eaux vertes et bleues de la mer. Randonnée de Crozon-Morgat
Cap de la Chèvre. L'incontournable étape de la visite de la presqu'île
de Crozon. Le bois du Kador mérite une visite minutieuse pour son patrimoine
militaire, naturel et l'apaisement qu'il procure. Les falaises sont perforées
de grottes marines, visitables par excursion maritime à partir de Morgat.
Un sill de microgranite est visible aussi.
Le bois du Kador porte le nom de la pointe du Kador, ou Gador, ou Cador = Chaise.
Calvaire de Margerie - Beg ar Gador - Pointe de Morgat
Charles Marie Eugène Jacquin de Margerie (16 janvier 1855
– 17 juillet 1934 – Paris) et son épouse Charlotte Louise Marie Rohault
de Fleury (28 décembre 1864 – Paris – 1943) ont 9 enfants dont 2 sont
morts très jeunes. Deux des filles seront religieuses. Cette famille aristocratique
catholique de diplomates et de militaires, pour l'essentiel, voit avec
grande inquiétude l’enrôlement de 3 fils (Gérard 1891-1977, Hubert 1892-1958,
Alain 1899-1979) pour partir à la guerre. La première guerre mondiale
éclate et afin de protéger ces trois soldats, promesse est faite à Dieu
qu'un calvaire sera élevé s'ils reviennent indemnes de la grande guerre.
Le destin accéda à cette prière. Le calvaire est enregistré chez un notaire
de Paris comme concession perpétuelle en novembre 1927.
Les terres appartenaient à l'armée puisque le fort du Kador est à deux
pas. Après le déclassement, une vente aux enchères s'est effectuée ce
qui permit à Charles de Margerie d'en faire l'acquisition le 6 mars 1899.
Le terrain portait le surnom de "Champ de bataille" ! La famille
de Margerie était propriétaire de la villa Jeanne d'Arc non loin de là
devenue hôtel de la Montagne.
On peut y voir les symboles de la croix de guerre et
de la légion d'honneur qui pourraient représenter les décorations reçues
par le lieutenant à titre temporaire au 4ème Bataillon de Chasseurs, Hubert
Jacquin de Margerie, l'un des fils "protégé", (le 12 septembre
1918 décoré en tant que chevalier de la légion d'honneur). Ce n'est qu'une
hypothèse.
Cette plaque n'est pas d'origine. A la construction du calvaire, seule
une inscription à la peinture rouge apparaissait : "Pater ave
50 jours d'indulgence".
Les blasons des 2 familles
°°°
Présence d'un chevron sur chacun des blasons, ceci
pourrait signifier que la noblesse acquise, le fut par les armes.
La Famille Rohault de Fleury est une très ancienne famille dont le plus
illustre aïeul est un Général d'empire devenu Pair de France. Le Général
baron Hubert Rohault de Fleury (1779-1866).
La Famille Jacquin de Margerie, connue depuis le 18ème siècle, connaissait
une médiatisation "quotidienne" au travers de Christophe de
Margerie, ancien PDG de Total, décédé accidentellement en 2014.
Le calvaire est visible sur la Pointe de Morgat, Beg ar Gador sur le GR34 – Bois du Kador.
Le quartier des pêcheurs de Morgat
Le cœur de Morgat était un village de pêcheurs dont chaque famille vivait dans un penty - une petite maison de pierre blottie dans un quartier desservi par des venelles qui se croisent et se décroisent avec beaucoup d'imagination. Les maisons d'origine étaient en pierres nues, beaucoup désormais sont crépies et colorées mais bien souvent avec les fameux volets de bois avec le bleu de ciel ou de marine...Le vieux quartier des pêcheurs représente le lieu de vie d'origine à l'Est du Loc'h. Les Romains y vivaient déjà et "rangeaient" leurs sardines dans des cuves de salaison.
Les conserveries - usines des conserveurs
Maison du conserveur Caradec.
°°°
Un propriétaire de biens à Crozon décide d'investir
dans une conserverie. Le marché de la sardine à l'huile semble lucratif
à la fin du 19ème siècle. L'administration accorde le droit de construire
une usine à gaz, une conserverie et une maison privée à Morgat.
Edouard Caradec devient alors un employeur majeur dans le port. Les pêcheurs
de sardines lui proposent directement leurs poissons qu'il rémunère faiblement
et les épouses travaillent à la conserverie.
Dans la nuit du 15 au 16 août 1879, l'usine flambe sans faire de victime
pour des dégâts estimés à 150000frs dont seulement 60000frs sont assurés.
L'homme d'affaires quitte la presqu'île quelques années plus tard en ayant
tout vendu ses biens immobiliers.
L'usine est reprise par un Monsieur Vacher qui cède l'affaire à Michel
Poriel en 1910 (riche conserveur de Douarnenez) qui se retrouve à la tête
de deux conserveries à Morgat, la seconde étant "l'usine du bas"
dite Poriel. "L'usine du haut" cuît les sardines, elles sont
séchées sur la place et mise en boîte dans "l'usine du bas".
Le terme "haut" provient du fait que l'usine est construite
sur la rue de la Montagne qui grimpe sévèrement et le terme "bas",
par opposition, vient de l'installation au niveau de la mer de la seconde
usine.
"L'usine du haut" est bombardée lors de la seconde guerre mondiale,
seule la maison du propriétaire subsiste. En bas l'usine est moins abîmée.
Ultime propriétaire des deux ruines, Monsieur Timothée Ansel entre 1955
et 1963. L'usine Caradec est rasée définitivement, par contre l'ancienne
usine Poriel du bas est reconfigurée en trois maisons à louer.
La maison haute centrale derrière l'arbre, faisait office de bureaux de la conserverie Poriel et d'appartement du gérant à l'étage.
Usine Poriel.
Bureaux et logement du gérant.
°°°
L'usine conserverie Poriel dite "usine du bas" par
les Morgatois pendant la période d'exploitation au début du 20ème siècle
est le seul vestige industriel de la période sardinière. Morgat avait
connu trois usines qui permirent aux femmes de trouver un emploi extérieur
à leur foyer. Ce fut prometteur, ce devint difficile tant les salaires
étaient bas.
La première usine semble avoir été celle de Robert Chancerelle en 1872.
Cette usine dont il reste les structures des ateliers passa de mains en
mains, se nomma un temps "Société Bretonne" puis fut rachetée par Michel
Poriel en 1918.
Les familles Chancerelle et Poriel sont de grosses familles Douarnenistes
qui fructifient leurs capitaux issus de la pêche dans une accumulation
d'entreprises. Les conserveries esseulées ferment boutique rapidement
(sous les effets de la concurrence) comme celle dite "usine du haut" d'Edouard
Caradec (devenue Poriel) ou pire encore la conserverie du quai à l'emplacement
de l'abri du marin ayant appartenu à Charles Plaçon quatre ans à peine,
dès 1897.
Michel Poriel avait tenté, en 1902, de s'installer au Conquet sur des
terrains aux enchères qui lui échappèrent, alors de se retrouver investisseur
à Morgat lui parut naturel d'autant qu'il en confia la propriété à sa
fille qui elle-même délégua la gestion à un contremaître qui habitait
au-dessus des bureaux dans l'unique bâti en hauteur de l'usine. La manutention
étant importante, les ateliers de cuisson, de sertissage, etc, devaient
être de plain-pied, ce qui explique ce bâti de petite hauteur et de grande
longueur...
L'usine basse connaît le même sort que l'usine haute, le bombardement
de Morgat entrainant la destruction partielle. Les lieux sont aujourd'hui
alloués à la restauration.
Pour mémoire. Avant que les usines ne fussent construites,
70 maisons de pêcheurs préparaient la sardine selon la technique de la
pile au sel cru pour presser les sardines et ainsi les conserver suffisamment
sans pour autant être en mesure de les exporter comme va pouvoir le permettre
la mise en boîte métallique des usines. Dans d'autre port, on utilisait
la saumure. Morgat était à part...
Les investisseurs ont balayé une tradition et une forme de libre entreprise
accessible aux familles de pêcheurs bien que tellement tributaire des
quantités de sardines pêchées journellement. Les deux styles de vie ont
apporté la précarité en dehors de quelques entrepreneurs qui ont trouvé
l'aisance tant que la sardine à l'huile était considérée comme un produit
de luxe. Avec la banalisation du produit, la baisse des prix, la délocalisation,
les conserveries ont fermé les unes après les autres.
La poste de Morgat
Ancienne poste (bleue) de Morgat.
Entre 1908 et 1940, il exista une poste saisonnière sur
les quais de Morgat. Elle disposait d'un poste téléphonique et exécutait
les opérations courantes. La poste délivra des timbres français tamponnés
de l'aigle du 3ème Reich avec une croix gammée durant l'été 1940, puis
le bureau ne rouvra pas.
La nouvelle poste saisonnière vint de la décision du service des domaines
maritimes du 26 février 1972 de faire cession d'une parcelle de 54.40m²
pour 4350Fr à la commune de Crozon qui fit construire un nouveau bâti
inauguré le 30 juin 1972. Elle est mitoyenne à un ancien poste de douane
devenu ensuite entrepôt des Ponts et Chaussées. Elle est en fonction jusqu'à
ce que le service postal ne soit transféré à l'office du tourisme en décembre
2007.
A cette date, une "nouvelle" postière, nouvellement formée gère
les affaires de courrier mais ne s'occupe plus des affaires financières
transférées à la poste principale de Crozon. La nouvelle postière attend
un ordinateur d'un instant à l'autre.
A noter que le style de la construction est typique des maisons bretonnes
des années 1970, rives de toit relevées, encadrements en granit brut,
mur crépi qui dans le cas des maisons individuelles est essentiellement
de couleur blanche.